Créativité et intuition

La créativité est la faculté de connecter entre eux des objets mentaux pour former de nouveaux objets mentaux. Ces nouveaux objets mentaux sont-ils vrais, correspondent-ils à des faits ou à des processus du monde réel? S'ils sont vrais, il y a plus de chance que mon action donne un résultat dans le monde réel. Si je leur attribue une grande valeur, indépendamment du fait qu'ils soient vrais ou faux, je les utiliserai pour agir. Par quelles opérations puis-je créer ces nouveaux objets mentaux qui sont organisés en croyance, règles et lois. Ces opérations sont l'intuition, l'induction, la simulation, l'établissement de relations, la logique et l'expérimentation. Nous avons représenté par un diagramme les différentes combinaisons de ces opérations.

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opérations de créativité

Les différentes chemins parcourus correspondent à des activités intellectuelles différentes qui sont réalisées en fin de parcours, par exemple:

2 religieux, artiste

5 juriste, moraliste, manager

6 plan économique, règles de circulation

11 philosophe

16 étude des relations entre éléments d'un ensemble

17 étude des relations entre éléments d'un ensemble

18 étude des relations entre éléments d'un ensemble

19 étude des relations entre éléments et l'ensemble

L'intuition est la première opération de créativité. Selon le dictionnaire, l'intuition est la connaissance claire, directe, immédiate de la vérité sans l'aide du raisonnement. Cette connaissance correspond bien à une croyance. Nous dirons que c'est une association soudaine d'objets mentaux qui a un sens et qui provoque une impression agréable par l'attribution d'une valeur.

La particularité de cette association c'est qu'elle est soudaine et imprévisible. Nous avons vu que les objets mentaux sont constitués de réseaux de neurones, et que ces objets mentaux pouvaient s'associer et ainsi former un plus grand réseau de neurone. Le réseau de neurones est formé de neurones qui communiquent entre eux à une certaine vitesse, suivant un mode de transmission. Il existe deux modes de transmission, le mode normal correspondant à l'attention aux détails et le mode explosif qui est rapide, sans vérification et est flou. C'est ce mode explosif de transmission qui correspond à l'intuition. Ce phénomène est similaire aux avalanches d'un tas de sable. Si on laisse s'écouler du sable de façon continue, on constate que le sable se met en tas, et que soudainement de façon imprévisible il y a des avalanches. Tant que le sable s'écoule, il y a des avalanches. De même tant que l'on associe des objets mentaux, il y a une probabilité que le mode explosif de transmission entre neurones produise une intuition.

Si l'individu est à cours d'objets mentaux, à cours d'idées, il doit rechercher des informations relatives au problème à résoudre pour continuer à associer des objets mentaux. Pour que le sable continue à s'écouler, il faut aller chercher du sable ailleurs, et pas dans le tas. En général les informations disponibles pour résoudre le problème sont en quantité limitée et un blocage apparaît rapidement. Pour augmenter la quantité d'informations il faut généraliser le problème, se poser des questions dans un cadre plus vaste, moins précis, que celui du problème à résoudre.

Mais il faut aussi que cette association ait un sens, c'est à dire que ce nouvel objet mental s'associe à la carte mentale de l'individu. Cette carte mentale est constituée de tous les objets mentaux de l'individu, de toutes les informations dont il dispose, celles qui ont quelque chose à voir avec le problème à résoudre et toutes les autres. Au plus cette carte mentale est complète, au plus il possède d'informations générales, au plus il y a de chances que ce nouvel objet mental ait un sens, au plus il y de chances qu'il s'associe avec un objet mental existant.

Le processus d'intuition se termine lorsque le nouvel objet mental créé provoque une impression agréable, par l'attribution d'une valeur en comparant ce nouvel objet mental avec un des objets mentaux de la carte mentale. Cette valeur est fictive car le nouvel objet mental est un concept, il n'a pas encore de réalité. On ressent une euphorie.

Mais pendant le processus de l'intuition de nombreux nouveaux objets mentaux ont pu être refusés parce que les valeurs attribuées provoquaient des impressions désagréables. De plus le fait de chercher une solution et de ne pas la trouver provoque aussi une impression désagréable. Ces valeurs sont fictives car les nouveaux objets mentaux sont des concepts, ils n'ont pas de réalité. On ressent de la mauvaise humeur, un sentiment de mal-être, une humeur de frustration ou d'infériorité, d'anxiété. Le rendement du processus d'intuition diminue et si le processus est continué un état de stress apparaît.

Pour diminuer les inconvénients de cette situation il faut essayer de se mettre dans un état de détachement, c'est à dire attribuer aux objets mentaux rejetés des valeurs pas trop faibles, qui ne créent pas des impressions très désagréables. Il est important de réaliser que les valeurs attribuées aux solutions rejetées sont des valeurs fictives, que ces solutions ne correspondent à rien de réel maintenant, et que du fait qu'elles sont rejetées elles ne seront jamais réelles. Il est important de comprendre que le sentiment de mal-être provient du fait que l'on ne contrôle pas le déroulement du processus de créativité et que ce processus n'est pas contrôlable, mais que nous pouvons seulement augmenter les chances qu'il se réalise.

Pour annuler les inconvénients de cette situation, il faut pratiquer la respiration yoga qui annule les effets des activateurs internes causés par l'attribution de valeurs fictives.

Le processus de l'intuition doit se dérouler en continu, mais par intervalle. Une nouvelle idée peut être obtenue après plusieurs mois, en y pensant régulièrement de temps en temps, mais il n'est pas possible de fixer une date limite,tel ce scientifique dont la réflexion a duré trois mois pendant une période de vingt sept années.

Le fait d'attribuer des valeurs aux objets mentaux provoque des blocages émotionnels qui diminuent la production d'idées. Y a-t-il moyen de penser sans attribuer de valeur? Y a-t-il des modes de fonctionnement du cerveau pour lesquels le mécanisme d'attribution de valeur n'intervient pas, du moins consciemment?

L'intuition sera plus productrice d'idées si le mécanisme d'attribution de valeur ne fonctionne pas, si le cerveau est dans un état de rêve éveillé caractérisé par les ondes theta.

Le processus de l'intuition est continu et nous l'avons comparé au tas de sable sur lequel s'écoule continuellement du sable. Si le problème est constamment présent à l'esprit, le flot d'idées apparaissant pendant l'état theta peut être comparé au phénomène d'avalanche du tas de sable.

La créativité commence à l'âge de deux ans chez l'enfant et continue pendant la vie adulte, avec plus ou moins de succès selon que le mode de pensée intuitive de l'enfant est toléré ou refoulé pendant l'éducation.

Selon Piaget, l'enfant entre 2 et 7 ans est au stade intuitif. Il tire des conclusions basées sur de vagues impressions, il associe des objets mentaux et leur attribue une valeur absolue de vérité, il crée des croyances.

Entre 7 et 12 ans l'enfant passe au stade opérationnel concret. Il associe des objets mentaux, et en plus il structure cette association par un jugement rationnel conscient. Il utilise l'induction pour créer des règles et il attribue une valeur à ces règles, valeurs qui guideront son action. La question de vérité ne se pose pas réellement, la règle est utilisée si la valeur du résultat obtenu en appliquant la règle provoque une impression agréable, si non la règle sera changée.

Après 12 ans l'enfant passe au stade opérationnel formel. Il peut classer les éléments de l'association en relation de cause à effet et vérifier la possibilité de vérité par le jugement rationnel logique, par la déduction. Il peut tester la vérité de la conclusion par l'expérimentation et ainsi créer une loi.

Depuis 1980, l'homme dispose d'un outil lui permettant d'améliorer les processus d'induction et de déduction, c'est la simulation sur ordinateur qui permet en plus d'étudier les relations entre les éléments d'un ensemble et l'ensemble et de découvrir des lois complexes. Aujourd'hui c'est toujours l'intuition qui est au départ de la créativité. Mais en ce début du troisième millénaire, la difficulté de trouver de nouvelles idées, d'associer des objets mentaux, est diminuée par l'utilisation de nouveaux outils.

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