Lorsque nous observons un changement, il est toujours sous-entendu que ce changement s'observe pendant une période de temps déterminée. Et c'est en fonction de cette période de temps que nous définissons des types de changement. Pendant une même période de temps d'observation nous constatons qu'il y a des événements qui changent rapidement, d'autres lentement et d'autres encore qui ne changent pas. Nous pouvons représenter graphiquement l'évolution de ces événements soit en fonction du temps, soit par leurs relations entre eux. Suite à une action, une situation change, nous pouvons représenter graphiquement ces événements.
Comment le changement peut-il être représenté? Le cerveau est un organe de contrôle, il permet à l'individu de contrôler et de s'adapter à son environnement. C'est à dire de réaliser un changement si l'environnement change, d'agir pour rétablir ou atteindre une situation. L'action est déclenchée par la valeur attribuée à la comparaison de la situation actuelle avec la situation désirée; ce n'est pas la valeur qui nous intéresse mais les relations entre l'action, la situation et le temps. Ce type de relation peut être trouvé par la cybernétique qui est la théorie du contrôle et qui s'applique à tous les mécanismes ou organes de contrôle. Laissons la théorie de côté et considérons un exemple auquel cette théorie s'applique. Vous avez déjà tiré une chasse d'eau, il est évident que le réservoir se remplit, mais vous êtes vous déjà demandé pourquoi il se remplit d'abord très vite et ensuite de plus en plus lentement. Ce phénomène est dû à un mécanisme de contrôle. Le niveau maximun de l'eau correspond à la situation désirée qui dans ce cas doit être rétablie. Le niveau de l'eau en fonction du temps correspond à la situation en fonction du temps. Le débit de l'eau correspond à l'action, c'est le débit qui fait changer le niveau, c'est l'action qui fait changer la situation. Au départ le débit est important, mais il est quand même limité par l'installation. De même au départ l'action est maximum, mais limitée à une certaine grandeur T
c. Le principe du mécanisme de contrôle c'est que le débit s'arrêtera lorsque le niveau sera atteint, c'est à dire lorsque la différence entre le niveau et le niveau désiré sera nulle. De même le principe de l'organe de contrôle c'est que l'action s'arrêtera lorsque la situation désirée sera atteinte. Comment varie le niveau en fonction du débit, ou quelle est la fonction qui satisfait l'égalité suivante: différence de niveau = fonction (débit)? Cette égalité peut s'écrire litres = fonction * litres/secondes. La fonction est une constante de temps Ta qui s'exprime en secondes; litres = secondes * litres/secondes ou litres = litres. De même la fonction qui relie la différence de situation à l'action est une constante de temps Ta. Il faut remarquer que la fonction qui relie l'action à la différence de situation est 1/Ta, le taux d'action qui est la grandeur de l'action pour une différence de situation d'une unité. La relation entre l'action et la situation peut être représentée graphiquement et nous appellerons cette courbe une ligne de comportement.Dans le cas du mécanisme de la chasse d'eau les grandeurs T
c et Ta sont fixes. Dans le cas de l'organe de contrôle qu'est le cerveau les grandeurs Tc et Ta sont variables. L'individu peut changer l'intensité de son action initiale et son taux d'action soit progressivement en fonction de son expérience personnelle, soit de façon aléatoire par essais et erreurs, soit par l'apprentissage, soit par la créativité.Envisageons d'abord le cas du changement progressif dû à l'expérience personnelle. Si l'individu a un comportement correcteur, c'est à dire s'il n'a pas l'expérience de la situation et de l'action, T
c, l'intensité du maximum de son action sera faible et 1/Ta, son taux d'action sera faible (la constante de temps Ta sera élevée).Si l'individu a l'occasion de répéter son action pour atteindre une même situation il peut progressivement augmenter son taux d'action et l'intensité de son action initiale. Cette action d'augmentation est déclenchée par la valeur attribuée à la comparaison du temps mis pour atteindre la situation désirée et un temps désiré. Mais cette augmentation est limitée. Un organe de contôle n'est utile que s'il est stable, c'est à dire que lorsque la situation désirée est atteinte, lorsqu'elle ne change plus. Nous avons représenté la situation, l'action et la ligne de comportement pour différentes grandeurs de T
c et Ta.
Reprenons notre chasse d'eau et à mis hauteur donnons lui un coup de marteau de telle façon qu'il y ait un trou. Le mécanisme de contrôle possède des paramètres T
c et Ta qui sont fixes mais en plus le niveau à atteindre est fixe. Lorsque l'eau atteint le niveau du trou, elle atteint un niveau critique. Ce niveau est critique parce qu'au delà de ce niveau le mécanisme de contrôle ne contrôle plus le niveau et met toute l'installation en danger. De même si un individu agit pour atteindre une situation désirée, il se peut qu'une fois une certaine situation atteinte il y ait danger ou insatisfaction pour lui. De même le mécanisme de contrôle qui détermine le comportement précognitif ne contrôle plus la situation, le comportement précognitif est inadapté à la situation critique.Outre la propriété de contrôle et d'optimisation de l'action, le cerveau possède la propriété d'adaptation de l'action à la situation. Si l'individu rencontre une situation critique il doit changer quelque chose. Si c'est la première fois qu'il rencontre cette situation critique et qu'il ne possède aucune information sur cette situation critique, à part l'impression désagréable qu'elle produit, le cerveau produira un changement aléatoire inconscient des paramètres du comportement.
On peut se demander quel est le nombre nécessaire d'essais pour arriver à un nouveau comportement stable. En simulant le processus on constate que le nombre d'essais est relativement faible comme indiqué sur le graphique de probabilité de réussite. Il faut toutefois remarquer que la simulation suppose que le choix des paramètres au hasard est libre, c'est à dire qu'il ne subit aucune contrainte. Certains choix peuvent être interdits par l'éducation et la culture du groupe, ce qui peut avoir pour effet d'augmenter le nombre d'essais et de prolonger la durée du comportement d'essais et d'erreurs. Le changement aléatoire inconscient correspond au cas où l'individu ne sait pas ce qui lui arrive.
Outre la propriété de contrôle et d'adaptation, le cerveau possède la propriété de vérification de la situation.
Une première difficulté du changement réside dans le fait que la situation désirée est souvent inconsciente et ne devient consciente que suite à une situation critique. Une deuxième difficulté réside dans le fait que les croyances, les règles et les lois, qui constituent l'organisation des objets mentaux sont souvent aussi inconscientes. Enfin une troisième difficulté peut exister du fait du conflit entre une situation désirée dans le passé et obtenue par changement aléatoire et une situation désirée dans la présent mais non clairement définie.
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